UNE SOIRÉE COMME TOUTES LES AUTRES

          Quand je rouvris les yeux, réveillé par un mauvais rêve, toujours le même depuis plusieurs mois, je m’aperçus, en jetant un coup d’œil sur le réveil, posé sur un tabouret à côté du lit, que je n’avais dormi que quatre heures.

          Etre ainsi réveillé en pleine nuit ne m’étonnait pas, tant il m’était devenu impossible de m’endormir, ou simplement me reposer, sans que ce rêve vienne troubler mon sommeil. C’est comme s’il faisait partie de moi. Il me poursuivait comme une ombre, et depuis toutes ces nuits, je savais qu’à chacune d’elles, je ne pourrais plus en passer une sans me sentir torturé, sans avoir à souffrir ces images, tous ces souvenirs qui ne cesseront jamais de tourbillonner dans mon esprit. Je sais cela, et quoique que l’on puisse dire, je persiste à croire que je ne mérite pas le quart de cette douleur, ni même le huitième. Oh ! Bien-sûr, j’ai peut-être commis quelques erreurs passées, mais maintenant, plus personne n’est là pour m’aider à les réparer. Alors, que faire ? Se résigner ? Fuir sa propre vie et en même temps celle des autres ? Non, personne ne me connaît suffisamment pour pouvoir me le dire.

 

            Je pensais encore à cela quand j’entendis la cloche sonner deux coups au clocher de l’église.

Deux heures ! Il était deux heures du matin, et je ne dormais toujours pas !

 

            Hier soir, au bar, j’avais encore beaucoup bu. Je sentais mon estomac toujours embarrassé.

Une chose dont je me souviens, c’est que nous étions deux au comptoir à boire plus que de raison. Moi, je buvais parce que l’approche de la nuit m’effrayait. Sans doute savez-vous ce que l’on peut ressentir lorsque la nuit arrive lentement, sans un bruit, et quand elle s’infiltre dans votre tête. Vous savez, lorsque vous vous sentez seul et trop faible pour la repousser. Alors vous buvez pour ne plus rien voir, pour vider votre tête et réchauffer votre corps. C’est pour cette raison qu’il fallait que je boive, sinon je n’aurais pu supporter la nuit et l’angoisse que son atmosphère amène.

Mais l’autre, celui qui buvait avec moi, non, il ne pouvait le faire que par vice. Il n’avait pas cette manière noble de porter le verre à ses lèvres, ni même cette douleur que l’on retrouve dans les yeux de quelques buveurs, le soir. Non, je n’avais trouvé aucun point commun entre lui et moi : c’était comme si un immense fossé nous séparait. D’ailleurs, quand il m’avait parlé, même le son de sa voix m’avait étonné, tellement que je ne me souviens plus d’aucune de ses paroles.. Je sais seulement qu’il parlait de sa femme, et puis de son boulot, qu’il venait d’être mis à la porte, justement parce qu’il avait été surpris en train de boire alors qu’il devait surveiller le fonctionnement d’une machine. Si j’ai oublié tout le reste, c’est peut-être aussi parce que je n’avais éprouvé aucune sympathie pour lui, ni même un brin de compassion. C’était physique : je n’avais pas aimé sa façon de boire, sans prêter attention à la saveur de l’alcool, et sans même s’être préoccupé pourquoi j’en étais venu à boire.

On ne s’était pas compris. Nous n’aurions pu nous comprendre…

 

            Des soirées entières, j’ai erré de bar en bar, à la recherche d’une étoile, mais je n’en ai jamais encore aperçue que dans des ciels nocturnes, hors de portée de mes mains.

C’est drôle comme je me souviens, qu’étant petit, déjà, j’essayais d’attraper les étoiles dans le ciel, mais je n’y parvenais jamais. J’avais tellement hâte de vieillir, de quitter ma jeunesse et de grandir pour les atteindre plus facilement…

Mais les années sont passées, et rien n’a changé.

Oui, pourtant, me diriez-vous, j’en possédais une jadis, il y a sept ans ou huit ans. C’est vrai. Mais pourquoi donc n’ai-je point su la retenir dans ma main, en la serrant très fort ? Je pourrais évidemment expliquer pourquoi ma main s’est ouverte sans que je le veuille, mais ce serait vain, je pense, puisque mon étoile s’est éteinte d’elle-même, toute seule. Elle a disparu en emportan,t une partie de ma vie. Sans doute est-ce pour cette raison que je parais si jeune maintenant, alors que je sens beaucoup de vieillesse en moi.

 

            De l’alcool, j’en avais bu plusieurs verres la veille, et je sentais mon estomac encore très embarrassé. Ma tête également me faisait mal, mais là, je ne pouvais en savoir l’origine : tout se mélangeait dans mon esprit, l’alcool et le bouillonnement des souvenirs. Et puis de très loin dans mon corps, je sentais par moment comme une envie de vomir toute cette douleur et tout cet alcool, et à chacune des vibrations de mes tripes, je me tordais sur mon lit, mes mains nouées autour de mon ventre.

 

            Ah ! Si seulement il y avait eu quelqu’un à mes côtés, j’aurais pu lui expliquer le pourquoi de cette douleur, lui faire comprendre qu’une seule femme pourrait guérir ma blessure, cette femme qui m’avait quitté il y a déjà si longtemps… Et pourtant, il y en avait une autre.

C’est vrai que depuis cette nuit où j’avais voulu disparaître, son image ne me quitte plus : chaque nuit finit par ressembler à la précédente, et chaque nuit, je ne trouve guère que l’alcool comme seul remède à ma douleur. Quelques fois pourtant, j’arrive à oublier tous ces souvenirs, à ne plus penser à rien.

 

            Ce soir aussi, j’aurais pu calmer cette douleur, en allant chez l’une de ces femmes que l’on trouve le long de la rue du Square. Mais non, je n’avais pas pu. Cela avait été plus que moi. Une force incompréhensible m’avait empêché de répondre à l’une d’elles lorsqu’elle m’avait fait un signe de la tête et du bout de ses lèvres.

 

            De nouveau, je sentis une immense vibration secouer mon ventre ! Je me roulais sur moi-même, tordu par la douleur. J’avais l’impression de ne plus pouvoir respirer : j’ouvris la bouche, mais ce ne fût qu’un son étouffé qui en sortit. Alors, en un geste brusque, à deux mains, j’arrachai ma chemise trempée de sueur. Des boutons sautèrent et rebondirent contre le mur d’en face et sur le parquet de la chambre.

Je me levai, torse-nu et en slip, pour aller ouvrir la fenêtre. J’espérais recevoir une bonne claque d’air frais  mais dehors la ville était encore chaude et pleine de ces moiteurs d’été qui donnent souvent la sensation de respirer un liquide. Seules, quelques vagues de cet air palpable m’amenèrent un peu de fraîcheur sur le corps : c’était comme des glaçons se posant sur ma sueur.

Pris d’un immense frisson parcourant toute la surface de ma peau, je décidai d’aller me recoucher.

Après avoir tiré les draps sur moi, j’aperçus en me retournant, coincée entre le sommier et le mur, une bouteille de whisky dont il restait encore un fond. Je la pris et la vidai d’un trait, sans respirer. La chaleur de l’alcool infusa rapidement à l’intérieur de mon corps. Je m’en sentis tout de suite mieux : les vibrations qui secouaient mon ventre semblaient s’être calmées.

 

            Dehors, la ville était silencieuse, comme morte depuis le début de la nuit.

 

La ville, je la connaissais bien, peut-être plus qu’une mère puisse connaître son enfant ! Elle était mienne.

Depuis cette première nuit où j’avais voulu disparaître, je me sentais heureux quand elle vivait, et triste quand elle s’endormait, le soir. Et ce soir, plus que tous les autres soirs, je sentais qu’une vieille douleur, enfouie au fond de moi, se réveillait lentement. C’était aussi comme si la ville toute entière souffrait cette torture, dans le silence et l’immobilité de l’instant présent.

Cette douleur, je ne la sentais plus dans mon ventre ; mais dans ma tête encore, tout un tas d’images continuait à tourbillonner.

Je me rendis compte que rien ne pourrait guérir cette blessure, surtout pas en demeurant couché, à chercher vainement le sommeil. Finalement, je me décidai à me relever pour me promener dans la ville. Il me semblait possible qu’en errant encore au moins une heure à travers les rues, que je parviendrais à ne plus penser à rien, et à ne plus souffrir cette douleur.

 

            Une fois dehors, je sentis le silence de la ville encore plus pesant que lorsque j’étais dans ma chambre.

Une autre sensation s’imposait également à moi, une sensation étrange, difficile à expliquer, comme si le silence de la cité essayait de me parler.

Tout cela me rappelait quelques histoires lues dans des livres où le rêve finit par ne plus faire de différence avec la réalité, des livres où l’on parle de cités et de forêts vivantes qui ont la possibilité de bouger… mais de telles scènes, bien-sûr, n’ont jamais existé que dans l’imagination de quelques écrivains fous. Ils sont malades ceux-là : c’est peut-être pour cette raison qu’on les enferme dans des prisons capitonnées. Je me souviens bien qu’une fois j’avais discuté de cela avec un ami : il m’avait dit que moi, tout comme ces écrivains, un jour on m’enfermerait entre quatre murs capitonnés. Je l’avais beaucoup surpris en lui répondant, qu’à la différence de ces fous, que personne ne pouvait m’enfermer dans aucune prison puisque j’étais déjà coincé dans ce monde, et que j’étais ma propre prison, et la ville en était les murs.

 

            Les rues étaient sombres, même si quelques lampadaires avaient été semés jadis, çà et là, le long des trottoirs.

Au bout de ma rue, la ville souffrait et je ne savais toujours pas de quoi. Je sentais son appel devenir plus pressant, et la ville devenir à chaque minute passée plus sombre qu’à la minute précédente, comme si l’atmosphère pouvait devenir plus profonde que l’obscurité.

La ville souffrait, mais pourtant, me promener ainsi à travers les rues me remplissait d’un bonheur indéfinissable. Je regrettais même d’avoir eu, l’espace d’un instant, le désir de trouver le sommeil. Je songeais que si je l’avais obtenu, jamais je ne me serais senti si proche de la ville, et sans doute n’aurais-je jamais eu l’occasion de pouvoir la comprendre.

Je me souviens très bien qu’une nuit, je m’étais éveillé, plein d’angoisse et humide de sueurs car j’avais entendu une voix m’appeler très fort, une voix qui semblait surgir de la nuit elle-même. En ouvrant les yeux, je n’avais vu que le vide autour de moi. Ce n’était qu’un mauvais rêve, mais j’avais eu le temps de reconnaître le son de cette voix, et je l’entends encore. Je crois que je l’entendrai toujours. Ce visage aussi, ce regard, cette bouche qui me parle, je ne les oublierai jamais.

 

            Au clocher d’une église, une cloche se mit à sonner trois coups.

Trois heures du matin seulement. Je remarquai combien les minutes étaient longues à disparaître : il y a heure à peine, j’étais encore dans ma chambre, sous mes draps, à chercher vainement le sommeil.

Il fera jour dans quelques heures, et je n’aurais toujours point fermé l’œil de toute la nuit. Je pensais , qu’une fois encore, je n’irai pas travailler, à moins que je rentre aussitôt pour profiter de quelques heures de sommeil.

 

            Je fis encore quelques pas, sans trop savoir où me diriger. J’écoutais leur écho sur les pavés, amplifié par le dédale des rues étroites.

 

             Soudain je m’arrêtai, le cœur battant !

Je levai les yeux vers une plaque de rue : la rue Alexandre 1er  de Belgique ! Un peu plus loin, sur la gauche, une porte vitrée d’immeuble m’indiquait le chemin à emprunter. Je fermai les yeux et revis, dans un tourbillon d’images, tous les souvenirs qui me rattachaient à cet immeuble, à cette porte si souvent poussée il y a quelques années, l’ascenseur, arrêt au quatrième étage, deux brefs coups de sonnette puis quelqu’un qui me priait d’entrer…

Mais ils avaient déménagé…

Bien des fois depuis, j’avais refais ce chemin, le cœur serré, de peur d’y trouver quelqu’un…

Je regardais encore la plaque, puis la porte vitrée, et songeais au déterminisme : je ne me serais point trouvé dans cette rue, ni même dans ce café la nuit dernière, il ne se serait jamais rien passé, à aucune des nuits précédentes si je n’avais pas connu cette fille.

Chaque instant de vie est tellement important. Il faudrait pouvoir ne jamais rien regretter –aucune seconde disparue-, mais pourtant, c’est si difficile d’accepter de souffrir, uniquement parce qu’une fois vécue, cette souffrance nous grandit et nous rend différent des autres.

Cette porte, je crois encore me souvenir combien de fois je l’ai poussée : je le faisais toujours avec une même angoisse dans le cœur, comme si je savais déjà que tout allait mal finir.

Cette porte, jamais plus elle ne se rouvrira, ni pour moi, ni pour personne d’autre : la vie a fui cet appartement. Il n’y a plus personne, seulement le vide…

Cette idée de vide me frappa droit au cœur, et me fit très mal.

A cet instant, je crois que si je m’étais trouvé devant une fenêtre, il me semble que je l’aurais ouverte pour enjamber le rebord et me jeter dans le vide. Mais il n’y avait rien autour de moi, seulement le vide… une rue vide, un appartement vide, un sourire disparu, un visage que je ne reverrai jamais plus… comme si la mort avait emporté ce rêve trop beau.

Personne ne peut savoir ce que l’on peut ressentir lorsque la vie quitte notre rêve, nos projets et toutes nos espérances. L’on ne peut s’imaginer le nombre d’années qu’il faut remonter la pente. Le nombre d’années…

 

            J’eus l’impression à un moment, que je rouvrais mes yeux, comme si ces sept ou huit ans de cauchemars se dissipaient lentement. La porte elle-même avait disparu, et je me retrouvais désormais au milieu d’une rue, en train de marcher.

Bientôt, j’aperçus un bar encore allumé. Etonné qu’il soit encore ouvert, j’en poussai la porte. J’allai directement au comptoir.

            - Un double whisky, s’il vous plait.

            - Tout de suite, Monsieur… Mais on allait fermer…

 J’en bus aussitôt plusieurs gorgées, et je sentis descendre en moi cette brûlure que je connaissais si bien. Ma tête me devint lourde, très lourde, et ce poids fit disparaître peu à peu celui qui pesait sur mon cœur. Mais intérieurement, cela faisait mal, très mal de savoir les raisons pour lesquelles je ne pouvais m’empêcher de boire…

Cela faisait déjà depuis tellement d’heures que le soleil s’était étaient, et maintenant pour être solidaire avec l’obscurité de  la ville, le barman venait d’éteindre les néons de la salle.

On fermai le bar.

            - Tout le monde dehors ! On ferme ! Avait-il crié avant d’éteindre.

 

Comme à mon habitude, j’avais encore beaucoup bu et c’est en titubant, en me cognant et en renversant quelques chaises que je parvins dehors. Là, si l’air frais me réveilla un peu, je sentais quand même on estomac et ma tête très embarrassés. L’alcool avait créé une douce chaleur dans mon esprit. Boire, parfois était un besoin car l’alcool m’empêchait de trop réfléchir. De tant penser, j’avais l’impression d’épuiser mon esprit, pour rien, puisque je ne parvenais jamais à créer que plus de vide autour de moi.

Ce n’est pas vrai lorsque l’on dit de moi que je me fais volontairement du mal à boire ainsi. Je bois pour éviter de retourner dans mon esprit des tas de souvenirs qui me font, à chaque fois, que déchirer un peu plus la blessure que je porte en moi. Et ce soir, si j’ai bu plus que d’habitude, je crois que c’est pour c’est pour toutes ces raisons-là. Si je ne l’avais fait, je n’aurais pu supporter l’angoisse apportée par la nuit, et la solitude que l’on ressent à son approche. Je sais que si le barman ne m’avait mis à la porte, j’aurais laissé mon esprit se fondre  lentement dans l’alcool. Mais quelle joie suprême ! Ne rien penser, seulement voir défiler dans sa tête des masses de nuages, souvent de couleur rouge, et d’un blanc laiteux aussi. Ne rien penser et ne rien souffrir…

Une horloge sonna quelque part cinq coups.

Le barman devait déjà s’être couché et endormi depuis quelques minutes, peut-être même dans les bras d’une femme. Il n’avait sûrement pas besoin de boire pour passer une bonne nuit ! Moi, cette nuit, je ne savais pas encore comment j’allais la passer. De temps en temps, lorsque je passais par la rue du Square, celle où justement on trouve toutes les femmes que l’on désire, bien plantées le long des trottoirs, ces nuits-là, il m’arrivait de la passer la moitié de la nuit chez l’une d’elles. Mais ce soir, je ne me sentais vraiment pas le cœur à le faire. Je me sentais dégoûté, tout comme lorsque l’on boit encore un verre et que l’on sait que le prochain nous ferait vomir tous les autres, alors ce dernier verre on le déguste. C’est pour cette raison que ce soir je ne voulais pas achever mon énergie chez une de ces femmes. Je dégustais mes quelques dernières gouttes d’énergie, précieuses comme quelques dernières gouttes d’eau dans un désert.

            Non, ce soir, je voulais sentir l’alcool bouillonner en moi, jusqu’à la fin, sans qu’il n’y ait personne pour m’en empêcher.

Par moment, je laissais le rire monter en moi quand je passais devant une de ces femmes. Je riais de savoir qu’elle s’imaginait que j’allais peut-être monter avec elle dans la chambre. Je riais parce que je savais la futilité de leur occupation. Je riais parce qu’elles me faisaient rire… Je riais, mais au fond de moi, je pleurais amèrement… car elles auraient pu me donner des douceurs autres que celles que je pouvais obtenir par l’alcool.

Vraiment quelle ironie de s’imaginer tout cela ! Penser qu’il suffirait de dire « oui » de la tête, et puis monter à sa suite, en laissant derrière soi les vêtements que la société nous avait enfilés. Je riais de penser aussi à cela ! Ah, si elles savaient tout cela, elles iraient se cacher plutôt que de vouloir tenter le pauvre bougre avec une ivresse plus chère que l’alcool.

 

            Mes pas m’amenèrent finalement à la porte de mon immeuble.

Comme je la poussai, elle se mit à grincer abominablement, et les escaliers en bois gémirent aussi jusqu’à ce que je parvienne à mon étage.

Il me fallut un bon quart d’heure pour gravir mes cinq étages.

 

Parvenu en haut, je dus m’arrêter un instant, assis sur la dernière marche, pour reprendre mon souffle et reposer mes jambes.

Je me relevai pourtant, bien avant que j’eusse récupéré toutes mes forces car sentant le sommeil envahir mon corps.

 

J’ouvris avec le pied la porte du studio qui n’avait plus de verrou depuis longtemps.

 

En premier, j’entrai dans les WC pour y vomir : j’avais l’impression qu’en moi toutes mes tripes s’étaient nouées. Je ne parvins à cracher que le chewing-gum que je mastiquais depuis le début de la soirée. J’en conclu que mes tripes ne devaient pas être dans un si mauvais état que ça. Par contre, ma tête vibrait toujours autant.

Je m’aspergeais la figure avec de l’eau, puis allais m’étendre sur mon sommier.

 

Le son d’une radio, encore allumée, venait jusqu’à mes oreilles, à travers la cloison du mur.

J’écoutais et je chantonnais un peu.

 

            La dernière vision dont je me souviens avant de m’être endormi fût une petite araignée sur le plafond, juste au-dessus de moi, ma chambre étant éclairée, par intermittence, par la lumière d’une enseigne lumineuse accrochée à l’immeuble d’en face.